CHAPITRE VII

Il aurait été incapable de dire pendant combien de dizaines de mètres il avait couru avant d’y voir assez clair pour obliquer dans la petite ruelle. Et il n’avait pas compté les coups de feu qui avaient fait résonner la rue de la même manière que s’il s’était trouvé dans une caverne au lieu d’être à l’air libre. En tout cas, aucune balle ne l’avait touché et il n’avait pas l’impression que ses poursuivants gagnaient du terrain sur lui. Au départ trébuchante, sa course s’était rapidement faite plus assurée. Juste avant de tourner dans la ruelle, il courait coudes au corps, sans crainte d’entrer brusquement dans un obstacle invisible…

Est-ce que ses yeux s’étaient finalement habitués à l’obscurité ? Ou n’était-ce pas plutôt l’obscurité qui, à mesure qu’il courait dans cette rue sans nom, se délayait peu à peu dans la très vague nappe rouge orangé qui poudrait le ciel au-dessus des toits ? Il n’aurait su le dire. L’essentiel est qu’il pouvait désormais distinguer à ses pieds le trottoir laqué de ce reflet lointain, voir aussi, comme d’imprécises ombres dans l’ombre, les fûts des réverbères éteints et les masses inertes des véhicules, toujours aussi peu nombreux, accotés au trottoir. La ruelle sur sa gauche était semblable à une crevasse haute et mince dans une falaise de carton anthracite. Il s’y infiltra sans réfléchir. Les pas de ses poursuivants craquetaient à une distance impossible à définir. À un moment ou un autre, ils avaient cessé de s’interpeller, de crier, de murmurer. Dans son dos, il n’y avait plus eu que ce crépitement sur le macadam, une grêle acharnée qui ne voulait pas cesser. Quand Jo avait tourné dans la ruelle, la grêle avait paru s’éloigner, mais ce n’était qu’une fantaisie des ondes sonores, un faux espoir.

Jo recula dans la ruelle, sans cesser de fixer son orée. Son pistolet, de nouveau braqué à bras tendu, était prêt à cracher. Son index chatouillait la détente repoussée jusqu’au cran de sûreté. Il lui suffisait de la pression la plus minime pour qu’une première balle parte. Jo se sentait étrangement calme. Ou plutôt il ne sentait rien en lui, rien du tout. Ni frissons de glace, ni oppression de poumons en feu, ni paralysie due à la peur ou à l’incompréhension. Toutes ces réactions de son organisme avaient disparu, elles s’étaient envolées, au cours de ce laps de temps bien bref où il avait fui entre la ruelle derrière chez lui et cette nouvelle ruelle où il se terrait. Il ne chercha pas à analyser cette fermeté nouvelle. Il l’acceptait dans un coin de son cerveau, elle faisait partie de lui, de son corps vivant qui se mouvait avec aisance.

Sa main gauche derrière ses reins toucha une surface lisse. Il la contourna, se baissa, se fondit contre la masse oblongue. Un tonneau ? Plutôt une poubelle, dont il sentit sous ses doigts la surface cannelée de métal mou. Il bloqua sa respiration. Le bruit des pas avait brusquement enflé, le seuil de la ruelle à moins de dix mètres de lui se peupla d’ombres en mouvement. Elles ralentirent, il sentit, physiquement, l’impact d’yeux fureteurs sondant le noir dans sa direction. Une fois encore il ne put chasser l’impression que ces yeux-là voyaient dans l’obscurité. Il adhérait au flanc de la poubelle, il avait rabattu son bras contre son épaule gauche, le froid de son arme glaçait sa joue. Il n’y eut pas un murmure à l’entrée de la ruelle. Dans un sens, c’était plus effrayant que si les traqueurs avaient parlé à voix haute. Ils allaient faire quoi ? Se déployer et avancer ? Envoyer un éclaireur ? Fernando allait-il arroser le parallélépipède au hasard ?

Jo recompta mentalement les balles qu’il avait tirées. Trois. En principe, il lui restait six projectiles. Et s’il se redressait brusquement et ouvrait le feu sur les ombres ? Non, c’était trop risqué. Et puis… il revoyait la grosse femme blonde, la mère de Chris, regarder avec étonnement le trou dans sa poitrine et le sang noir qui en jaillissait. Il fallait combien de balles pour les abattre ? Ses lèvres pesaient sur le canon de son pistolet, un baiser, une morsure. L’attente fut interminable. En réalité, elle faisait partie de cette sorte d’éternité qui ne dure que quelques secondes. Puis les pas se firent à nouveau entendre, ils décrurent, ils s’éloignaient dans l’enfilade de la rue.

Jo attendit encore d’autres longues secondes avant de se redresser. Son bras armé tomba le long de son flanc. Ils étaient partis ! Ils ne l’avaient pas vu, ils avaient pensé qu’il avait continué dans la rue principale, ils étaient loin, il ne percevait même plus le bruit des pas sur le trottoir. Il respira à fond, tourna le dos au rectangle vertical garance foncé qui signalait l’entrée de la ruelle, s’y enfonça en continuant à raser le mur. Au-dessus de lui le ciel rougeâtre n’était qu’un filet irrégulier entre les mâchoires zigzaguantes des toits rapprochés. Il pensa que là-bas, vers l’ouest, la ville brûlait. Il pensa à une forge gigantesque, à un chaudron, à un réacteur nucléaire sans contrôle. Les images naissaient dans son esprit et s’évanouissaient aussi vite. Il avançait, il ne voyait rien devant lui qui signalât une issue à la ruelle. Il heurta une autre poubelle qui oscilla et qu’il rattrapa. Elle était légère, elle devait être vide.

Aucune fenêtre n’était éclairée sur les façades qui l’enserraient, bien entendu. Mais à cela aussi il s’était fait : à cette absence totale de lumière dans la ville, cette absence de vie, hormis celle, tenace, de ses poursuivants. Il essaya de s’imaginer, fourmi errant dans une ville morte, un labyrinthe obscur, dont il devait trouver la sortie sous peine de périr. Il essaya de trouver une logique à cette situation d’insecte traqué. Il était un criminel si dangereux que la ville entière avait été évacuée tandis qu’on le recherchait. Ou alors les autorités avaient plus simplement recommandé aux gens de se terrer chez eux, dans le noir, de faire le mort pendant que… De faire le mort ! Bien sûr, ce genre d’explication n’avait aucun sens commun. Ou alors… ou alors il n’était pas un criminel, mais il avait été contaminé par quelque chose, il était porteur de virus mortels. Il ne fallait pas l’approcher, il fallait rester chez soi, confiné, jusqu’à ce qu’on l’abatte, qu’on l’évacue dans un caisson stérile, qu’on incinère son corps et qu’on recueille ses cendres dans un conteneur plombé.

Cette idée-là grouilla un moment sous son crâne. Pendant quelques secondes, il avait failli y croire. Mais elle n’était pas plus plausible que le reste. Il ne se sentait pas malade, et cela n’expliquait pas que ce fussent des parents, des amis qui se soient lancés à ses trousses, au lieu d’équipes spécialisées. Cela n’expliquait pas Mikhaïl, Aïcha, Chris… Dans quelque direction qu’il lançât des hypothèses, il retombait toujours sur le cul-de-sac de la folie.

Le canon du pistolet heurta une surface verticale. Il en parcourut la rugosité, du plâtre se détacha au bout de ses doigts. Il n’avait pas vu l’obstacle, ce pan d’obscurité qui lui barrait la route. Il traversa la ruelle, qui faisait à peine plus de trois mètres de large, il retrouva sous sa paume la façade opposée. Ce n’était pas une ruelle, c’était une impasse. Le cul-de-sac de la folie s’était matérialisé en une cellule où il se retrouvait coincé. Il jura silencieusement. Il n’avait plus qu’à rebrousser chemin. Les pas de la meute en marche avaient depuis longtemps fondu dans le silence de la ville morte. Il pouvait se dégager de l’impasse, filer vers l’autre extrémité de la rue.

Il se détourna du mur bloquant la ruelle, refit face à la fissure grenat. Il n’avait qu’une cinquantaine de pas à faire pour sortir du piège. Il n’en fit guère que la moitié. Une ombre apparut dans le rectangle sirupeux, une silhouette immobile, à peine discernable dans le flot de l’obscure luminosité du chaudron lointain. Jo aspira une goulée d’air fade qui humidifia ses lèvres. Le goût métallique revenait dans sa bouche. Il n’avait pas vu l’homme franchir le seuil de l’impasse. La fissure rouge s’était meublée instantanément de la silhouette, sans qu’il ait eu conscience d’un mouvement. Son bras droit se releva, ses doigts se bloquèrent sur les encoches de la crosse. La silhouette ondula dans le sirop glauque, elle se mit à avancer vers lui, lentement, lentement, comme ralentie par une eau épaisse. L’homme avait une arme, un fusil.

Jo tenait l’homme au fusil aligné dans sa ligne de mire. Il n’avait qu’à presser la détente et… Mais il ne le faisait pas, il ne pouvait pas. La détonation aurait immanquablement attiré le reste de la troupe. Et qui sait si les autres traqueurs n’avaient pas déjà rebroussé chemin, à la suite de ce solitaire qui avait dû avoir un doute et avait tenu à vérifier ? L’index de Jo était électrisé par la tension. Une pression d’un millimètre et le coup partait. L’homme dans l’ombre s’avançait vers lui, fusil levé. L’index de Jo était parcouru d’un fourmillement si insupportable qu’il le dégagea du pontet, par précaution. C’est alors que la voix de l’homme s’éleva :

— Alors, mon petit Jo, on se retrouve, pas vrai ? J’ai eu raison de suivre mon intuition. Je savais bien que tu aurais trouvé le moyen de te défiler. Mais pas longtemps, tu vois… Pas longtemps !

L’homme avançait toujours. La saveur métallique assécha davantage la gorge de Jo. Son bras trembla, commença à s’abaisser. Il avait maintenant une raison supplémentaire pour ne pas tirer, la meilleure : l’homme au fusil avait une voix à la fois sèche et cassée, la voix de son père. L’homme qui était maintenant à guère plus de cinq pas de lui et qui braquait son arme vers sa poitrine était son père. Il déglutit.

— Papa. Écoute…

Il s’interrompit, il n’aurait su quoi dire d’autre. Papa ? L’homme était son père, oui, il le savait. Mais il ne s’agissait que d’une donnée abstraite remontée du marigot de sa mémoire toujours obscurément brouillée, il ne parvenait pas à la remplir de véritables souvenirs, de gestes, de paroles, de rires, d’événements vécus ensemble. Il avait en face de lui une ombre chinoise qui avait la silhouette de son père, la voix cassée de son père – mais rien d’autre, rien de plus que ces signes extérieurs d’une paternité sans relief et sans profondeur. L’ombre chinoise nimbée de rouge incarnat avait épaulé, elle le visait tranquillement, à trois mètres de distance. La main de Jo écrasait la crosse du pistolet au canon baissé. L’homme, son père, n’était pas armé d’un fusil très dangereux, en fait. Seulement d’une carabine calibre .22, il la revoyait telle qu’il l’avait remarquée d’un coup d’œil ébahi lorsque la troupe avait fait irruption chez lui. Du .22, oui, mais à cette distance…

— Papa…, lâcha-t-il une deuxième fois dans le cliquetis rugueux de sa gorge de fer.

Seul un ricanement lui répondit, cette sorte de ricanement qu’aurait très bien pu émettre Fernando lui-même. Un ricanement chuintant, qui s’acheva en sifflement. C’est ce sifflement, ce filet d’air expulsé par une bouche aux lèvres serrées qui fit réagir Jo. Ou, plus exactement, qui fit réagir en lui une pulsion dont il n’était pas maître, même s’il la connaissait déjà, s’il l’avait déjà éprouvée dans sa chair… Ce sifflement, les chenilles froides et gluantes remontant le long de sa colonne vertébrale… et cet autre qui agissait à sa place, et qu’il regardait agir à l’intérieur de son corps, par ses nerfs crépitants, par l’explosion de ses muscles. Jo s’envola.

L’homme qu’il regardait agir, cet homme costaud mais un peu lourd, ces 85 kilos de viande et d’os, cet homme-là avait bondi vers l’ombre à la carabine. Un bond qui ressemblait à un envol tellement il avait été subit, rapide, précis. Les 85 kilos percutèrent la silhouette en son centre, la tête de Jo s’encastra dans l’estomac de l’homme, son bras droit lui cercla la taille, sa main gauche avait saisi le mince canon de la carabine, déviant l’axe de l’arme. Jo chuta en même temps que son poursuivant. Il avait traversé trois mètres sans élan, il avait fait un saut plongeant qu’aurait pu lui envier un joueur de rugby, à part que Jo n’avait jamais joué au rugby. Les deux hommes prirent sans douceur contact avec le sol pavé de la ruelle. Le dos de son ennemi craqua. Jo s’amortit sur lui. Son seul souci était d’arracher la carabine à son adversaire avant que celui-ci ait le temps de tirer. Il y parvint. Il se retrouva à genoux sur le ventre de son père, le fût de la carabine dans la main gauche. L’homme sous lui se tordit, le déséquilibra. Il soufflait sur un rythme rapide… non : il sifflait. Mais l’escalade humide des chenilles à travers ses vertèbres n’avait plus aucun effet sur Jo, sur ses muscles et ses nerfs, sur cette machine de combat qu’il était devenu, ou redevenu.

Il roula sur le côté, sans un mot. Il avait lâché son revolver, il le fit partir d’un coup de talon plus loin dans la ruelle pour que l’homme ne puisse le récupérer. Il brandit la carabine à deux mains, crosse vers le bas. Son bout ferré cueillit à la pointe du menton l’homme en train de se relever. Une fois de plus Jo entendit le bruit très caractéristique de l’os qui se brise dans sa gaine de chair. Mais on s’habitue à tout. La tête de l’homme partit en arrière, Jo doubla son coup. La crosse atteignit une orbite, s’y incrusta. Cette fois le bruit fut bien différent, mou et spongieux, comme lorsqu’on marche sur…

Jo ne s’attarda pas sur ces évocations vomitives. Et d’ailleurs rien ne pouvait le perturber dans sa tâche. Il frappait, ses bras n’étaient plus qu’un double piston maniant une presse. Chtong ! Chtong ! Chtong ! Les coups s'enfonçaient dans la face et dans le crâne, éparpillant méthodiquement les esquilles d’os qui se tassaient à l’intérieur de la fragile coquille. Pas une seule fois l’homme ne cria. Les sifflements étaient montés vers un aigu de cocotte-minute qui laisse fuser sa vapeur, puis ils s’étaient syncopés jusqu’à n’être plus qu’un grésillement de papier froissé confondu aux coups. Jo cogna bien plus longtemps que cela n’aurait été nécessaire. Mais de toute façon, ce temps si long ne se comptait qu’en secondes de trop. Quand il se releva, le serpent avait cessé de siffler, il ne bougeait plus. Quand il se releva, son père était mort, bien mort, la tête éclatée, le crâne en bouillie sur les pavés graisseux de son sang.

Jo n’était même pas essoufflé, il ne suait pas. C’était « l’autre » qui s’était battu à sa place, qui avait tué. Maintenant « l’autre » l’abandonnait, il le sentait se détacher de sa peau et de son esprit, mais à regret, en tirant sur ses nerfs et en forçant sur ses synapses. Le Jo qui redevenait lui-même regarda son père. Son père ? Il n’arrivait vraiment plus à considérer cette ombre en croix sur le sol comme étant son père – un homme qui l’aurait accompagné toute sa vie, ou au moins toute sa jeunesse et qui… Sa vie ? Sa jeunesse ? Il recula mentalement devant le vide effrayant dans lequel il avait commencé à avancer le pied. Les pensées perturbantes refluèrent, emportant avec elles les questions à naître. L’homme étalé sur le sol n’était qu’un ennemi, qui avait voulu l’abattre mais dont il avait été vainqueur. Et c’est en regardant la forme inerte qui s’enrobait peu à peu d’une tache d’encre à son extrémité supérieure qu’il put faire deux constatations étonnantes… mais qui en vérité ne l’étonnèrent pas.

Un, il voyait dans la nuit. Il n’avait pas enregistré ce fait pendant les sursauts du bref combat, mais maintenant il s’en rendait compte. Le corps étendu, la découpe franche des pavés rectangulaires, l’orée de l’impasse donnant sur le liséré perceptible du trottoir… il voyait tout cela. Pas parfaitement bien sûr, mais en tout cas le monde avait perdu cette opacité totale au sein de laquelle il s’était jusque-là débattu. Était-ce l’effet de l’aura rougeoyante dont la luminosité s’était brusquement accrue ? Était-ce l’accoutumance ? Il ne savait pas. Mais l’essentiel était que désormais il allait pouvoir se diriger autrement qu’en aveugle…

La deuxième constatation, il la fit sur le corps qui saignait et fumait à ses pieds. Ce corps qui saignait noir, et dont le sang épais et noir grésillait, rongé d’une sourde combustion. En esprit, il revit une fois encore Chris, et les traces sur le parquet, et la fleur noire dont les pétales s’étendaient sur la robe jaune. Il recula. Son talon heurta un objet métallique. Son pistolet automatique, qu’il ramassa et enfourna dans sa poche arrière. La carabine à la crosse luisante et poisseuse était encore dans sa main gauche. Il la fracassa contre le mur, jeta l’arme inutilisable. Il n’entendait toujours rien dans les profondeurs de la ville. Les autres traqueurs le cherchaient toujours, seule cette chose dont l’image dans son esprit répondait à cette absurde désignation – son père – était revenue sur ses pas.

Il contourna le corps écartelé, râpant le mur pour passer le plus au large possible de ce cadavre nimbé d’une sereine brume d’un pâle violacé. Il s’aplatit contre l’angle de l’impasse. La rue principale lui apparaissait… Il chercha un moment une comparaison, une référence. Elle lui apparaissait comme au travers d’un appareil à infrarouges, oui, de vagues volumes fantomatiques, sans relief, soulignés par des traits au minium. La rue se brouillait sur sa droite et sur sa gauche en un fouillis de lignes contradictoires, les fenêtres alignées sur les façades en face de lui n’étaient qu’un damier uniformément noir plaqué sur un pan bordeaux. Mais l’essentiel était qu’aussi loin que son regard neuf pût porter, il ne voyait plus ses poursuivants.

Il émergea de la ruelle, tourna cette fois sur sa droite. Puis encore une fois à droite. Il était dans une autre rue semblable à celle qui lui était perpendiculaire, une rue aux fenêtres obscures, aux magasins à la devanture grillagée, et qui se prolongeait vers d’incertaines biffures écrasées par les volutes figées du ciel rouge. Il ne reconnaissait rien. Il ne savait pas où il allait. Son seul but était de s’éloigner de sa maison, de tous ces gens qui le traquaient, de tous ces corps qu’il était obligé de laisser derrière lui, ponctuant sa route de cauchemar de terribles flaques de sang noir et fumant.

Il traversait une large artère plantée d’arbres indistincts quand un cri et un coup de fusil retentirent simultanément, quand une grêle de plombs de chasse vrombit quelque part derrière sa nuque. Il se remit à courir droit devant lui dans la nuit rouge.